Info de la semaine 26


En 2006, mon père m’a emmené voir « Une vérité qui dérange » d’Al Gore. J’avais 10 ans quand j’ai pris conscience de l’imminence du désastre climatique. Pendant des semaines, les images de la montée des eaux, de tsunamis et de mégafeux ont peuplé mes nuits. Si les cauchemars ont fini par se faire plus rares, la peur ne m’a jamais vraiment quittée et elle a guidé nombre de mes choix passés et présents. Camille Étienne, une jeune activiste écologiste a dit ces mots qui résonnent en moi « Il est urgent d’avoir peur à la hauteur du danger. […] La peur est une réaction vitale qui nous permet de nous sortir de notre apathie ». C’est donc au grès des rencontres, des voyages et de mes premiers engagements associatifs et militants, que j’ai trouvé la force de m’approprier cette peur, de la transformer en besoin urgent d’agir et de ne pas céder à la résignation. Ma réponse a été de donner un sens écologique et pratique à mon projet professionnel en m’intéressant aux enjeux alimentaires et agricoles de nos territoires, où les conséquences sociales et environnementales sont particulièrement visibles.

Comme beaucoup d’autres, j’essaye d’être cohérente, de faire ma part à l’échelle individuelle mais je ne sais m’en satisfaire. Les règles du monde dans lequel nous vivons ne sont pas faites pour être écolo et c’est pour cela que nous devons encourager ceux qui s’y efforcent et continuer de s’engager collectivement pour changer ces règles. Comme beaucoup d’autres, je désire un futur qui ne me condamne pas d’avance à me battre pour accéder aux ressources ou à regarder ceux qui y seront obligés sans rien pouvoir y faire. Comme beaucoup d’autres jeunes, mon désir de vivre est difficile à anéantir car je préfère imaginer la fin de ce système capitaliste profondément inégalitaire plutôt que d’accueillir la fin du monde.

Avec toutes les connaissances que l’on détient actuellement, toutes les alertes scientifiques qui sont parues et toutes les solutions qui sont trouvées, issues par exemple de la Convention Citoyenne pour le Climat, parler d’inaction climatique n’est plus adéquat et il faut se résoudre à y voir la volonté des pouvoirs publics de conserver l’ordre établi. Or dans nos systèmes démocratiques, nous avons les droits de nous associer et de nous exprimer pour introduire du débat et contester les décisions politiques injustes. Les soulèvements de la terre font partie de ces lueurs d’espoir qui montrent la possibilité d’un mouvement écologique d’envergure, en explorant d’autres moyens d’agir qu’en s’en remettant patiemment aux promesses des dirigeants. Sa dissolution annoncée la semaine dernière, tout comme la répression récente de ces nombreuses luttes écologistes, doivent nous alerter. Un communiqué d’experts des Nations Unies datant du 15 juin dernier fait écho à cette situation : « Le manque de retenue dans l’usage de la force à l’encontre des membres de la société civile qui revendiquent de manière pacifique leur participation aux processus décisionnels concernant leur avenir, l’accès aux ressources naturelles, la protection des droits humains, la dignité et l’égalité, serait non seulement anti-démocratique, mais profondément inquiétant pour l’État de droit ». Pour autant, tout n’est pas perdu. Poursuivons cet élan et les graines qu’il sème. Du côté de nos territoires, de nombreuses initiatives existent et se créent chaque jour pour construire le monde de demain, plus juste, solidaire et reconnecté à la nature. Continuons donc de nous soutenir, d’agir selon nos sensibilités et nos moyens, de cultiver nos engagements et d’être toujours plus nombreux à s’opposer à l’accaparement des biens communs et à se battre pour les droits humains. Ce qui repousse partout, ne peut être dissous.

Ce texte ne reflète pas la position de notre structure et reflète seulement celle de son autrice.

Bonne semaine ! Dernière feuille de chou de Florine, volontaire service civique